Le fait même que cette réforme soit maintenue malgré les oppositions de l’ensemble des catégories sociales et socio-professionnelles peut sembler surprenant. Plus encore, la sévérité des mesures évoquées : faire reculer l’âge légal de 62 à 65 ans relèverait d’une grande rigueur. C’est revenir à la situation d’avant 1981 et, de fait, il s’agirait d’un recul et non d’une avancée.

Mais pour FO-Cadres, peut-être même plus encore que l’âge légal, l’éventualité d’un allongement de la durée de cotisations est inacceptable. Le cumul des deux entrainerait inexorablement un effet ciseau dont les cadres seraient les premières victimes, eux qui, relativement à la durée de leurs études, intègrent tardivement le marché du travail. Si l’on ajoute au tableau la réforme de l’assurance chômage, il faut inventer un nouvel outil : la cisaille à trois lames.

FO-Cadres l’affirme : ces réformes sont injustes, dénuées de toute logique économique et sociale. Elles ciblent particulièrement les cadres et ingénieurs en poste ainsi que les classes moyennes, déjà lassés d’être prises pour cible, stigmatisés, taxés de privilégiés. Elles font payer le prix de la crise et les mesures de soutien aux salariés. Elles privent les nouveaux arrivants sur le marché du travail d’une quête de sens fondamentale à un accomplissement individuel et collectif.

Que dire aujourd’hui aux jeunes générations ? Aux jeunes diplômés ? Que leur investissement dans les études supérieures -au plus grand bénéfice du pays- aura un coût, celui du sacrifice et de la quasi-certitude de ne jamais pouvoir bénéficier dans de bonnes conditions d’une retraite méritée ? Cette réforme et les finalités qui la sous-tendent portent gravement atteinte à notre pacte républicain et à la justice sociale. Elles contribueront une fois de plus à semer la colère, ce qui, en des temps déjà troubles, relève de la plus grande gravité.

Pour FO-Cadres, les mesures envisagées constituent un non-sens économique, à l’heure où même le COR affirme que la nécessité d’une réforme des retraites dépend avant tout des opinions politiques de ceux qui en débattent. Si problème il y a dans le système actuel, c’est bien le financement qui entre en ligne de compte. Au lieu de se pencher sur cette question et d’envisager d’autres options, le Chef de l’État fait une fois de plus le choix de la baisse des droits.

Pourtant, ces autres options existent bel et bien : balayée en quelques phrases par le Président de la République, l’augmentation des cotisations salariales et patronales, pourtant plébiscitées par près d’un français sur deux selon un sondage IFOP, n’intègreront même pas le débat. D’ailleurs, le Chef de l’État n’a soulevé qu’un élément de cette possibilité, puisqu’il n’a même pas pris la peine d’évoquer les cotisations patronales.

Si réformes il devait y avoir, elles doivent porter sur des politiques économiques favorisant l’emploi et la réindustrialisation. Elles doivent également assurer le maintien des seniors dans l’emploi, ainsi que la garantie d’une rémunération juste et efficace. Dans le cas inverse, le résultat ne relèverait que d’une posture idéologique, paupérisant toujours plus notre système de protection sociale et compromettant gravement le rapport, déjà fragilisé, des salariés français -et notamment des cadres- à leur activité professionnelle.