Le portage salarial consiste pour une entreprise à «embaucher» des salariés, le plus souvent des cadres consultants, pour  exécuter des missions pour une autre société. En pratique, pour devenir «porté», le salarié démarche une société et lui propose ses services, avant de contractualiser une relation avec une entreprise dédiée au «portage salarial». Celle-ci se charge alors de son bulletin de paie, de calculer et de payer ses cotisations sociales. Et ce, avant de facturer le total de la prestation à l’entreprise «cliente», via une commission pouvant aller jusqu’à 17% du chiffre d’affaires réalisé par le salarié «porté».


Entre travail indépendant et régime salarié classique, cette relation triangulaire s’est véritablement développée dans les années 1990 en flirtant avec les limites de la loi qui proscrit le prêt de main-d’œuvre à but lucratif. Il aura fallu attendre la loi du 25 juin 2008 pour lui fixer un champ légal, dont le seul but est de protéger le portage salarial de ce délit. «Sauf que ces précautions réglementaires n’ont pas évité le contentieux devant les tribunaux, saisis par des “portés” lésés dans leurs relations contractuelles avec des simili employeurs. Par deux arrêts notamment (17 février 2010), la Cour de cassation avait retoqué la nature de ces contrats. Quitte à les requalifier parfois en contrat de travail classique. D’autres jurisprudences sont venues les renforcer, en particulier sur l’absence de règles sur l’indemnisation chômage, la durée du travail ou la rémunération, contraignant le législateur à revoir sa copie.


La négociation interprofessionnelle sur le portage salarial avait débouché, le 24 juin 2010, sur un accord signé entre CGT, CFDT, CFTC, CFE-CGC et le patronat (PRISME), mais rejeté par FO. À la suite d’un avis négatif de l’IGAS en 2011, les pouvoirs publics avaient renoncé à l’étendre tant il contrevenait encore à la jurisprudence. L’actuel gouvernement a rouvert le dossier ouvrant la voie à l’extension dudit accord par la publication d’un arrêté ministériel (JO du 8 juin 2013). Le mandat de la négociation de branche devait se limiter à la création d’un CDD d’une durée de trois ans maximum. L’arrêté crée un CDI avec un salaire brut mensuel minimal de 2.900 euros pour un temps plein.


Si FO considère que le recours au CDD dans le cadre du droit commun répond en partie à la spécificité du portage salarial, en revanche nous dénonçons les risques qu’emporte la création d’un CDI aménagé à l’activité de portage, « un CDI light ».


Il entretient la confusion en présentant ce CDI comme correspondant à “une ou […] plusieurs prestations de portage salarial” et en analysant les différentes prestations comme autant d’avenants constituant le CDI. Des règles qui ne mettront pas fin aux contentieux car elles restent contraires à celles d’un CDI obligeant l’employeur à fournir une activité permanente à son salarié, reposant sur l’activité qui les unit, et non sur celles d’un contrat commercial avec un tiers.


C’est pourquoi FO compte déposer un recours contre cet arrêté.