Petite précision, l’entretien annuel d’évaluation est bien distinct de l’entretien professionnel qui se tient quant à lui tous les deux ans afin d’identifier et/ou d’envisager les perspectives d’évolution professionnelle du salarié avec le recours éventuel à des formations pour compléter les connaissances et les compétences.

 

Pourquoi l’entretien d’évaluation est-il « stressant » ? Pour le salarié, c’est l’occasion (éventuellement) de solliciter une réévaluation de sa rémunération. En outre, et eu égard au contexte que nous connaissons tous, l’entretien prend aujourd’hui une autre tournure. Autrement dit, les salariés attendent ‘autre chose’ de la part de leur manager et plus généralement de leur entreprise. D’une manière générale, la bienveillance doit être le maître mot, celle-ci devant guidée tout l’entretien notamment parce qu’au cours de ces deux dernières année a été constatée une forte dégradation des facteurs de risques psychosociaux.

 

La QVT (qualité de vie au travail) est donc l’enjeu de l’année 2022. La question est d’autant plus d’actualité avec la recrudescence du télétravail et de l’entremêlement entre la sphère professionnelle et la sphère privée des salariés et face aux risques d’isolement qui peut en découler. Une vigilance accrue sur ces points est nécessaire. De ce fait, c’est une discussion à avoir lors de l’entretien.

Mais pour que ces entretiens soient fructueux encore faut-il que la parole soit libre. Il faut donc que le manager crée les conditions pour un dialogue harmonieux où chacun puisse s’exprimer comme il le désire tout en ayant l’attention de son interlocuteur.

 

Les représentants du personnel bénéficient-ils d’un entretien annuel d’évaluation ? En théorie oui, en pratique (malheureusement) pas toujours. Pour les managers, les entretiens des salariés titulaires d’un mandat de représentation soulèvent des difficultés pratiques. Mais la ligne est pourtant claire : l’évaluation ne porte que sur les « performances » strictement professionnelles, ce qui élude impérativement toute dimension syndicale et l’existence même du mandat. Dès lors que l’employeur souhaite faire état de la conciliation entre les fonctions syndicales et les missions découlant du contrat de travail, un entretien ad hoc doit être organisé. La nuance est poreuse notamment parce que le manager peut être tenté de faire état de l’existence des missions représentatives pour justifier les incidences sur l’activité professionnelle. Cependant, dans cette situation, « les juges pourraient considérer que la discrimination syndicale est supposée, en raison de la prise en considération par l’employeur des conséquences de l’exercice d’une activité syndicale par le salarié sur son activité professionnelle et sa prestation de travail. Cela vise en pratique les références à un manque de disponibilité, à des absences, à un manque d’assiduité du salarié, à l’absence de prise en charge par celui-ci de toutes les activités liées à son poste de travail, à la difficulté de gérer son emploi du temps[1] ». Dans le prolongement, « est justifiée la condamnation d’un employeur pour discrimination syndicale dès lors qu’il n’a pas convoqué un représentant du personnel aux entretiens d’évaluation annuels et de diagnostic de carrière, dont il devait prendre l’initiative pour assurer l’évolution professionnelle du salarié conformément aux accords collectifs applicables[2] ». Le représentant du personnel est et reste un salarié de l’entreprise pendant toute la durée de ses fonctions syndicales et/ou représentatives. Il doit pouvoir prétendre aux mêmes évolutions que ses collègues qui se trouvent dans une situation similaire et à ancienneté comparable.

 

Depuis quelques années déjà, une défiance des salariés à l’égard des pratiques de management se dessine. Les entretiens annuels d’évaluation sont-ils (encore) adaptés au monde de l’entreprise ? Ne faudrait-il pas s’orienter vers de nouvelles techniques : feedback permanent ? évaluation collective ? La crise sanitaire a incontestablement bouleversé l’organisation des entreprises. Le télétravail ne semble être que la partie émergée de l’iceberg : mais qu’en est-il de la partie immergée ?

 

L’équipe FO-Cadres.

[1] Entretiens annuels d’évaluation et discriminations, Le Lamy négociation collective – 608, février 2017.

[2] Cass. Soc. 19 janvier 2011 n°09-70076, Non publié.