"Changer l'Europe grâce à des syndicats plus forts" 


 

Intervention de Marion Palm


Vouloir changer l’Europe c’est faire que l’Europe ne soit plus synonyme de crise, de remise en cause des droits sociaux, de dumping social, de dérégulation et de libéralisation des services publics.


C’est agir pour une Europe tournée vers l’investissement, l’innovation et le progrès social.


Pour exiger cette Europe, nous avons besoin de syndicats forts.


Des syndicats forts dans leurs capacités à se mobiliser pour exiger l’abandon des politiques d’austérité qui provoquent des désastres sociaux et qui affaiblissent l’Europe.


Des syndicats forts pour négocier dans l’intérêt des travailleurs des accords collectifs porteurs de droits, de garanties et de progrès social.


Mais pour être plus forts dans une société en pleine mutation, nos syndicats doivent également être plus attractifs et plus à l’écoute des aspirations et des préoccupations de l’ensemble des salariés, y compris des salariés les plus jeunes.


Plus attractifs pour que les jeunes soient convaincus de leur utilité. Une utilité qui se fait d’autant plus sentir que la jeunesse est de plus en plus inquiète pour son avenir face à la précarité et le chômage dont elle est la première victime.


Une inquiétude qui se manifeste actuellement en France contre le projet de loi El Khomri,  projet de réforme du Code du travail. Un projet de loi contesté par toutes les organisations syndicales françaises et dont FO exige, avec certaines d’entre elles, le retrait.


Si l’action syndicale répond en priorité aux jeunes en difficulté, elle ne doit pas oublier les jeunes qualifiés, les jeunes cadres et ingénieurs dont l’élévation du niveau de qualification et de connaissances est un formidable atout pour l’Europe. Nous ne pouvons ignorer cette réalité : par enjeu de syndicalisation, mais aussi par souci de faire évoluer notre syndicalisme pour coller au mieux aux réalités professionnelles et sociologiques de nos secteurs d’activités.


Or, les jeunes diplômés sont fragilisés faute de diplômes qui ne les protègent plus assez du chômage. Quant aux cadres et ingénieurs, leur situation professionnelle est plus que jamais synonyme de dégradation des conditions de travail.


Rendre plus attractifs nos syndicats c’est faire que nos actions répondent tant sur le fond que sur la forme aux préoccupations et aux aspirations de ces jeunes.


Sur la forme, nos actions doivent être innovantes et prendre appui sur les technologies de communication que les jeunes utilisent quotidiennement et dont ils sont les promoteurs.


Sur le fond, nos messages et nos actions doivent mieux répondre à leurs préoccupations et à leurs aspirations notamment en matière d’emploi, de formation, d’accès au logement et de qualité de vie au travail.


Sans oublier la perte de sens dont ils souffrent dans leur engagement professionnel faute d’un management qui ne les responsabilise pas assez, qui ne leur laisse pas assez d’autonomie, qui ne reconnaît pas leur investissement au travail et qui ne leur permet pas de concilier vie privée et vie professionnelle.


A défaut de quoi, nous prenons le risque qu’ils aillent chercher les réponses à leurs interrogations professionnelles au-delà de nos rangs.


Notre Congrès est une opportunité essentielle pour intégrer ces éléments dans nos pratiques syndicales et dans le fonctionnement de nos instances. Ces éléments sont de nature à favoriser l’engagement des jeunes dans les syndicats et par conséquent à les rendre plus forts pour peser notamment sur le cours de la construction européenne, et réaffirmer qu’une autre Europe est possible.


Rome, le 14 mars 2016


 

Intervention de Eric Pérès


Cher(e) s camarades,


Je tiens tout d’abord à remercier les organisateurs du congrès ainsi que nos camarades italiens pour la qualité de l’accueil.


Ce congrès est l’occasion de marquer notre volonté de changement pour  l’Europe,  et être plus fort syndicalement. Mais pour cela nous devons engager une rupture avec les politiques d’austérité qui sévissent dans toute l’Union et qui ont fait la preuve de leur échec. Nous sommes tous convaincus ici que cette voie est sans issue. Ces politiques ont contribué à la destruction de l’appareil de production et de l’emploi. La crise a ainsi laissé place à la croissance du chômage, de la précarité et des inégalités dont les effets contre-productifs sur l’économie se font encore ressentir. Il est donc urgent que l’Europe toute entière s’engage dans la voie de l’investissement et mette fin à l’austérité en adoptant notamment des politiques de relance via des programmes d’investissements et de grands travaux.


Etre plus fort syndicalement, c’est pouvoir exiger que soit mis un terme aux réformes qui défont les systèmes de protection sociale et fragilisent les travailleurs en Europe, et pouvoir dénoncer les réformes qui visent à renforcer la flexibilité du travail tout en voulant amoindrir le pouvoir des syndicats.


Etre plus fort syndicalement c’est également pouvoir négocier de nouveaux droits pour les travailleurs ; c’est refuser de faire de la décentralisation des négociations au niveau de l’entreprise le seul horizon pour défendre les acquis sociaux. Emprunter cette voie, c’est prendre le risque de renforcer le dumping social entre les travailleurs européens. Cette philosophie est actuellement portée en France par le projet de loi portant la réforme du Code du travail. Réforme dont notre organisation – FO – avec d’autres centrales syndicales françaises et les mouvements de jeunesse exigent le retrait.


Etre plus fort syndicalement c’est aussi pouvoir peser plus fortement sur les évolutions qui traversent le monde du travail. L’impact de la révolution du numérique sur la forme des emplois et sur le contenu du travail nous oblige à nous saisir de ces questions.


Source de progrès, la révolution numérique ouvre la voie à des évolutions techniques majeures dans de nombreux domaines dont ceux de la recherche et de l’innovation. Mais elle emporte également des conséquences économiques et sociales majeures en l’absence de réponses adaptées face aux destructions d’emplois prévisibles et aux protections futures indispensables pour accompagner et protéger les travailleurs de demain. Sans renoncer au progrès et à la
solidarité, nous devons réfléchir aux nouvelles protections sociales collectives qui doivent être attachés aux nouvelles formes d’emploi qui émergent avec la société du numérique.


Enfin, il est un sujet qui n’a pas fait l’objet, ici même, d’une intervention ou d’une présentation dans les différentes motions. Il s’agit de l’enjeu lié à la protection de la vie privée et des données à caractère personnel des travailleurs. Il fut un temps où ce sont les Etats seuls qui collectaient et traitaient des données relatives à la vie privée des individus pour développer certaines sources de renseignements. Pas toujours malheureusement pour servir et défendre les libertés individuelles.  Aujourd’hui, à l’heure du numérique et des réseaux sociaux planétaires, des données de différentes natures sont collectées de manière systématique et massive, et sont traitées en temps réel par de nombreux acteurs du monde économique. Sans vigilance de notre part, les risques d’atteintes aux libertés individuelles et collectives des citoyens en général, et des travailleurs en particulier, sont réels. Des risques liés à la vidéosurveillance, à la géolocalisation, au fichage des salariés, à la violation de la vie privée pouvant conduire à l’exclusion du bénéfice d’un droit, d’un emploi, etc... Qui sait ce qu’une entreprise peut faire d’un traitement de données personnelles de santé en matière de recrutement ou de gestion du personnel ?


Aussi, mes cher(e)s camarades, nous devons faire de la protection des données personnelles des salariés et de leur vie privée un axe fort de nos revendications syndicales futures.


Merci de votre écoute.


Rome, le 15 mars 2016