A l'occasion de la présentation du projet de loi, on s'était posé la question de savoir, comment une telle réforme pourrait s'appliquer à des salariés qui ne sont pas concernés par des dispositions reposant sur un calcul en heures de leur durée de travail ? A en croire le gouvernement FILLON/SARKOZY tous les salariés devaient être concernés par la réforme, mais in fine qu'en est-il vraiment pour les cadres ? Et l'impact du dispositif sera-t-il le même pour tous ?



Quelles sont les « heures » concernées par la loi TEPA (avantages fiscaux et sociaux) ?


Pour les cadres au forfait annuel en heures, il s'agit des heures effectuées au-delà de 1607 heures par an.


Pour les cadres au forfait annuel en jours, le dispositif s'applique à la majoration de salaire versée au titre des jours de travail supplémentaires effectués au-delà du plafond de 218 jours, à condition que le salarié renonce à ses jours de repos.


Il est essentiel de préciser que la réforme suppose que l'accord collectif applicable prévoit la possibilité « au salarié qui le souhaite », en accord avec son employeur, de renoncer à des jours de repos en contrepartie d'une majoration de salaire.


De plus, pour pouvoir bénéficier de la mesure de défiscalisation, le cadre doit travailler plus de 218 jours par an. Ainsi de facto, beaucoup de cadres au forfait annuel en jours se retrouveront excluent du dispositif, puisque comme l'indique l'enquête ACEMO de la DARES en 2004, le nombre moyen annuel de jours est de 214.


Le dispositif est dit également applicable aux jours et heures effectuées dans le cadre du dispositif transitoire de « rachat de jours de repos » (mesure applicable jusqu'au 31 décembre 2008, dans les entreprises d'au plus 20 salariés et en l'absence d'un accord collectif instituant un compte épargne temps.)



Quel est le régime fiscal des « heures supplémentaires » ?


L'exonération d'impôt sur le revenu s'applique à la rémunération horaire normale de l'heure supplémentaire ainsi qu'à sa majoration. La majoration salariale est retenue dans la limite des taux prévus par la convention collective, l'accord professionnel ou interprofessionnel applicable.


A défaut de convention ou d'accord, la prise en compte de la majoration salariale sera plafonnée :




  • pour les forfaits annuels en heures, à 25 % de la rémunération horaire pour les heures effectuées au-delà de 1607 heures. La rémunération horaire est déterminée à partir du rapport entre la rémunération annuelle forfaitaire et le nombre d'heures de travail prévu au forfait.

  • pour les forfaits annuels en jours, à 25 % de la rémunération journalière due en contrepartie du renoncement à des jours de repos au-delà de 218 jours. La rémunération journalière est déterminée à partir du rapport entre la rémunération annuelle forfaitaire et le nombre de jours convenus dans le forfait.


Il faut préciser que si un accord collectif d'entreprise prévoit un taux de majoration plus favorable que la loi ou la convention de branche, l'intégralité de la majoration ne sera pas retenue pour l'exonération fiscale.



Quel est le régime social des « heures supplémentaires » ?


Le décret du 24 septembre 2007 fixe le nouveau régime social des heures supplémentaires issu de la loi TEPA. Sont ainsi prévues une réduction des cotisations salariales et une déduction forfaitaire des cotisations patronales, qui auront nécessairement un effet désastreux sur nos régimes de protection sociale.


Le dispositif prévoit que tout heure supplémentaire ou assimilée ouvre droit à une réduction de cotisations salariales de sécurité sociale proportionnelle à la rémunération brute du salarié, dans la limite des cotisations et contributions d'origine légale ou conventionnelle rendues obligatoires par la loi dont le salarié est redevable au titre de cette heure.


Il faut donc déterminer le taux de la réduction (au maximum il sera de 21,5 %), puis le montant de la réduction de cotisations salariales.


Le taux de réduction des cotisations salariales est déterminé en fonction du rapport entre la somme des cotisations et contributions salariales au cours du mois où est effectué le paiement de la durée supplémentaire travaillée et la rémunération totale du même mois.


Le montant de la réduction est égal à la rémunération de l'heure supplémentaire multipliée par le taux de réduction. Cette réduction s'impute sur le montant des cotisations salariales de sécurité sociale. Son montant ne peut excéder celui des cotisations salariales de sécurité sociale dues pour l'ensemble de la rémunération.


Pour conclure, il apparaît clair que la loi TEPA est totalement inadaptée aux forfaits annuels en jours. Rappelons que 54 % des cadres sont soumis à un forfait annuel en jours (Baromètre FO-Cadres 2005).


Plus encore, la loi TEPA va créer un effet de substitution à toutes augmentations de salaires, qu'elles soient collectives ou individuelles. Ainsi, les employeurs vont sans nul doute donner la priorité à ce dispositif de défiscalisation dans la gestion de leur politique salariale et exercer une forte pression pour que cette mesure mal taillée puisse pleinement s'appliquer.


Aussi, cette logique passera nécessairement par une remise à plat des accords d'aménagement du temps de travail, tant avec la généralisation du dispositif de « rachat de jours » qu'avec le relevage au plafond du nombre de jours travaillés prévu dans les forfaits.


Textes de référence :
Loi TEPA n°2007-1223 du 21/08/2007
Décret n°2007-1380 du 24/09/2007
Circulaire DSS/5B n°2007-358 du 28/09/2007